Vingt descendants de Justes français ont été invités à participer au premier voyage "Mémoires de Justes", organisé par la Fondation France Israël, du 11 au 14 avril prochain. Ils seront les premier "ambassadeurs de la mémoire" à se rendre, en Israël, à l'occasion des cérémonies de commémoration de la Shoah, pour transmettre leur histoire.

 

Les membres de la délégation ont été contactés avec l'aide du Comité français de Yad Vashem

Jean Pierre FOUCAULT

Le 12 octobre 2009, Jean-Pierre Foucault, recevait la médaille de Juste Parmi Les Nations, à titre posthume pour son père Marcel.
Ce 12 octobre, l'Hôtel de Ville de Marseille servit de cadre à la cérémonie de remise, à titre posthume, du diplôme et de la médaille de Juste parmi les Nations à Marcel Foucault. Son fils, Jean-Pierre, les reçut des mains de Simona Frankel, Consul général d'Israël, et de Robert Mizrahi, Président du Comité Français pour Yad Vashem pour le Sud de la France.

Témoignage de Paula Foucault-Boyer, née Pessa Leska :
"J'ai vu le jour le 27 février 1916 à Mogelnica, en Pologne. J'étais la troisième de neuf enfants d'une famille juive traditionnelle. Mes parents tenaient une boulangerie-pâtisserie où ils travaillaient très dur.
Comme il n'y avait aucun avenir pour moi en Pologne, je suis partie en 1938 pour la Belgique où j'ai rejoint ma soeur Anna qui tenait avec son mari un supermarché de produits frais. Je faisais de mon mieux pour l'aider à tenir le magasin et élever ses deux enfants, Paulette et Maurice.
Et puis les Allemands sont arrivés en Belgique. Je suis alors partie sur les routes à pied, sans ma soeur, mon beau-frère et les enfants qui pensaient ne rien risquer...

En juin 1940, après l'armistice, j'ai pensé rejoindre l'Argentine en prenant le bateau à Marseille. Là, dans cette ville, je n'avais qu'un seul contact : Monsieur Falek. C'est grâce à lui que j'ai rencontré celui qui allait devenir mon sauveur, celui de ma famille et plus tard mon mari : Marcel Foucault.

Marcel Foucault m'a aidée tout au long de la guerre. Il prenait pour moi, comme pour d'autres juifs, des risques énormes. Il nous fournissait de faux papiers, essayait de nous trouver des logements et mettait sans cesse sa vie en péril pour sauver la nôtre.
En 1941, il avait rejoint le réseau "Combat", la plus importante organisation de Résistance en zone sud, où il tenait une rôle de "boîte aux lettres" dans les services de liaison, s'occupait aussi des dépôts d'armes et surtout de la fabrication de tickets d'alimentation et de faux documents.

Quand les rafles ont commencé à Marseille, alors qu'il me connaissait à peine, il m'a cachée chez une dame de la Rose, Madame Garnier, et m'a donné de faux papiers. Il payait lui-même ma logeuse chaque mois et me rendait visite sans cesse.
Quant à mes neveux, Maurice 5 ans et Paulette 9 ans à l'époque, s'ils sont en vie encore aujourd'hui, ils ne le doivent qu'au courage et à la générosité de Monsieur Foucault qui a pris tous les risques imaginables pour les sauver des griffes des Allemands.

Je peux vraiment dire que toute la famille que j'ai aujourd'hui, je la dois à celui qui est devenu mon Mari, car c'est lui qui a sauvé, au péril de sa vie, le peu de famille que les Allemands n'ont pas réussi à m'arracher.

 

La générosité de Monsieur Foucault à l'égard des juifs ne s'arrêtait pas à aider ma seule famille. Je sais qu'il a fourni à sa secrétaire, qui était juive, de faux-papiers. Malheureusement, elle fut arrêtée et forcée de dénoncer celui qui lui avait fourni sa carte d'identité. Vous n'imaginez pas le combat qu'il a fallu mener pour sortir Monsieur Foucault des mains de la Gestapo. Quinze jours très douloureux dont il est ressorti encore plus fort et convaincu de s'opposer à l'occupant. »

Capucine BONCENNE

Au début des années 1940, la grand-mère de Capucine, Denise Rieu Hachon, travaillait à la préfecture d’Auch (Gers). Après l’armistice elle devient une des secrétaires d’Auguste Dechristé, ancien sous-préfet de Ribeauvillé, qui dirige le service des réfugiés de la préfecture.

Dechristé prend alors une part active dans le camouflage d’armes pour venir en aide à un réseau de résistance appellé le deuxième dragon *, basé à Auch. En étroite collaboration avec Denise, il permet à de nombreux juifs repliés dans le Gers d’échapper aux recherches de la milice et de la gestapo.

Denise a notamment aidé les Witman, une famille de juifs réfugiés à Auch. Monsieur  Witmann, qui s’était battu dans l’armée française, avait été démobilisé et décida de s'installer à Auch. Il fut rejoint par son épouse Juliette et leur fille Nicole. Les parents de Juliette, M. et Mme Haker, arrivèrent quelques temps après. 

Vers la fin 1941, M. Witmann rentra à Paris pour récupérer quelques affaires dans son appartement. Il fut pris dans une rafle et déporté à Auschwitz dont il ne revint pas.  Denise Hachon procura de faux papiers à Juliette et à Nicole Witmann au nom de Windart et à M. et Mme Haker au nom de Hueber, patronyme alsacien.

Après la guerre, les deux familles rentrèrent à Paris et restèrent en relation très proche avec Denise Hachon, venue elle aussi s’installer dans la capitale. Le jour de ses noces, c’est M. Haker qui la donna en mariage à son fiancé, M. Rieu.

Denise aida égalemennt d’autres familles en cachant des enfants chez son père, Louis Hachon qui résidait à proximité d’Auch, dans la campagne. Une fillette appelée Irène Lezeroviez demeura cachée chez Monsieur Hachon pendant plusieurs années.

Ce sont les Witman qui demandèrent que le titre de « Juste parmi les Nations » soit accordé à Denise. Elle fut décorée à Yad Vashem en 1987.

 

* Les réseaux de résistance du Gers :http://guerre3945gers.wifeo.com/les-regiments-gersois-pendant-la-guerre-.php

Son témoignage :

  « L’histoire de ma grand-mère une composante essentielle de notre identité familiale. Née en 1918, elle n’avait que 24 ans lorsqu'elle a rejoint la Résistance. Quand je l’interrogeais à propos de son passé, en lui demandant ce qu’elle avait ressenti, elle me répondait invariablement que ses actes n’avaient rien d’héroïque, qu’elle ne s’était jamais posé de questions et qu’elle avait agi sans réellement prendre conscience des risques encourus.

Elle me racontait aussi une foule d’anecdotes : le vol d’armes et de mottes de beurre dans les camions des nazis en pleine nuit, son arrestation sur une route de campagne un jour où elle transportait des papiers confidentiels… La police a fouillé toute la voiture, ils ont même crevé les pneus…. sans s’intéresser au panier de fruits transporté par ma grand-mère qui avait caché les papiers sous des kilos de prunes…

L’humilité et le courage dont elle a fait preuve sont une inspiration pour sa famille et ses proches aujourd’hui. Elle nous a aussi légué l’amour et l’admiration que nous portons au peuple juif et à la terre d’Israël que nous avons visitée pour la première fois en 2005 avec ma mère pour aller voir l’arbre planté par ma grand-mère à Yad Vashem. A mes yeux, ce second voyage est une façon de rendre hommage à ma grand-mère et aux autres Justes de France. C’est à nous, aux jeunes générations, de transmettre la mémoire de ces hommes et femmes aux destins exceptionnels. Ce voyage sera aussi l’occasion pour moi de rencontrer Nicole, la petite fille sauvée par ma grand-mère, qui vit à présent à Jérusalem. »

 

Jessica BORIES

 Bien avant la guerre, les arrières grands parents de Jessica Bories, Jean & Andrée Orgeval, habitaient Pau et louaient des maisons à deux familles juives. Lors des couvres feux, son arrière grand père, Jean Orgeval, a alors commencé à les aider en faisant basculer une échelle derrière un grand mur pour leur permettre de se réfugier dans un parc qui était une institution religieuse.

 

Mr Orgeval a ensuite été mobilisé sur le front. Ses beaux parents ont alors pris le relai en aidant à cacher ces familles juives. Dès son retour, en 1940 Jean Orgeval intègre un réseau de résistance qui se nommerait COMBAT. Il était alors propriétaire d’une brasserie et sa mission consistait à faire passer des pilotes américains et canadiens en Espagne et de cacher des familles juives.

 

Mr Orgeval a reçu le titre de Juste parmi les Nations à titre posthume, en 1998,  pour avoir sauvé une mère et sa fille Suzy, qu’il a cachées dans cette brasserie pendant 1mois, et qu’il a ensuite fait passer en Suisse dans une camionnette EDF. Les  trois enfants de Jean (Monique, la  grand-mère de Jessica, Jacqueline, et Philippe.) se sont rendus en Israël pour recevoir ce titre.

Son témoignage : 

  « Ce n’est qu’en 1995 que ma famille et moi avons entendu parler de l’histoire de mon arrière grand-père grâce à Suzy qu’il avait sauvé pendant la guerre. C’est ma grand-mère qui me l’a appris. Mon arrière grand père était alors encore vivant et il est décédé deux ans plus tard en 1997. Il a fallut 14 ans de recherche à Suzy pour retrouver cet homme qui lui avait sauvé la vie. Quand elle a contacté mon arrière grand-père pour lui parler du titre de Justes, il a été très ému mais aussi surpris car il estimait n’avoir fait que son devoir. L’histoire de mon arrière grand père m’inspire beaucoup de fierté, c’est un acte de bravoure impressionnant. Nous avons gardé contact avec Suzy et sa famille. Son mari et elle ont vécu en Belgique pendant de nombreuses années. A leur retraite ils ont décidé de s’installer à Jérusalem. Ils sont venus plusieurs fois en France nous rendre visite et mes grands-parents sont même allés les voir en Israël. Suzy et son époux ont trois enfants qui vivent également à Jérusalem. Je n’ai jamais été en Israël mais je rêve depuis longtemps d’y aller, ce voyage était une magnifique occasion de découvrir ce pays. »

Pierre COLLARDEY

L’arrière grand-mère de Pierre, Madame Germaine Collardey habitait dans la commune de Saint-Léonard-de-Noblat  située en zone libre, dans le Limousin, non loin de la frontière avec la zone occupée. Dans un club de bridge qu’ils fréquentent à l’époque, elle et son mari André se lient d’amitié avec un jeune juif polonais en exil : Monsieur Henri Tenenbaum. Germaine procure son aide pour faire venir l’épouse d’Henri, Charlotte, et leur fille Jacqueline, née en 1941. Charlotte Tenenbaum et sa fille parviennent à quitter Paris et parvenir au-delà de la ligne de démarcation en juillet 1942. Charlotte a eu recours à un contact parisien anonyme, « Anjou 60 15 », qui lui a fourni une escorte policière à la gare. Quelques mois passent durant lesquels Germaine, surnommée Irma et Charlotte, surnommée Lotte, se fréquentent régulièrement et deviennent rapidement inséparables. Mais la milice, puis plus tard les Allemands, organisent des rafles à Saint-Léonard. En novembre, les Allemands occupent la zone sud.  Après plusieurs recherches infructueuses, Madame Collardey, parvient à placer les Tenenbaum en lieu sûr, dans plusieurs fermes isolées de cette région vallonnée du limousin. Jacqueline est hébergée chez des fermiers qui résident à une dizaine de kilomètres de là, au hameau de Perth, sur la commune de Champnétery. « Personne n'était au courant du séjour de [Jacqueline] à Perth. Elle ne pouvait ni sortir ni jouer avec les autres enfants. Souvent enfermée et séparée de sa mère, cette enfant a beaucoup souffert. (…) Je l'avais conduite dans une ferme, chez d'honorables cultivateurs qui ont bien voulu s'en charger, à leurs risques et périls. (…) Ils ignoraient même le véritable nom de famille de cette petite fille (…) mais ils étaient au courant de son origine juive (…)" (Madame Germaine Collardey, le 25 janvier 1989*)

Au printemps 1944, sentant une menace plus grande, les fermiers demandent à Germaine de reprendre l'enfant.  Germaine confie alors l’enfant à une famille de résistants, les Biaujou, dont la ferme est un repère de maquisards. En juin 1944, Lotte parvient à sauver la vie de tous les occupants de la ferme lorsqu’une division SS remontant vers le front de Normandie procède à une inspection du bâtiment. Sur le perron du corps de ferme, elle parle en allemand au SS chargé de l’inspection. Elle sympathise presque avec lui, car ils sont originaires de la même région en Allemagne. Elle lui dit aussi que le massacre des juifs et résistants cachés dans la ferme ne se fera pas sans pertes pour eux. Il ne dira rien, et signifiera à ses troupes de partir. A Oradour-sur-Glane, à 50 km de là, il y a quelques jours à peine, d’autres SS ont massacré et brûlé les corps de 642 personnes non résistantes, pour installer la terreur dans la région.

A la Libération, Germaine Collardey accueille Madame Tenenbaum et sa famille dans sa maison de Nogent-sur-Marne jusqu'à ce que Charlotte et Henri trouvent travail et logement. Charlotte sera professeur d’allemand, langue qu’elle aime avec passion, malgré le souvenir de l’oppression nazie. Henri exercera plus tard le métier d’ingénieur électronique. Jacqueline choisira de vivre en France, pays où elle a été élevée. Elle exercera en tant que chirurgien dentaire tout en consacrant du temps à l’écriture de scénarios et aux arts plastiques. Elle a aujourd’hui deux petits-enfants.

Madame Germaine Collardey a reçu le titre de « Juste parmi les Nations » en 1990, suite à des démarches entreprises par son petit-fils Dominique. Elle a appris cela peu de temps avant de partir dans l’au-delà. Dominique et son épouse ont eu l’honneur d’être reçus à la Knesset par le député président de la commission des Justes, cette même année. Il a reçu au nom de sa grand-mère la médaille des Justes à l’ambassade d’Israël en France.

 

* sources : http://www.ajpn.org/juste-Germaine-Collardey-670.html  et  « ANJOU 60 15 », Charlotte Tenenbaum, souvenirs de ma vie rédigés en collaboration avec Dominique Collardey, 1999.

 

Son témoignage :

« Mon arrière grand-mère ne souhaitait pas recevoir  de distinction particulière car ce qu’elle avait fait lui semblait être tout à fait normal. Elle a finalement accepté de raconter cet épisode de son histoire car elle était contente de le partager, et surtout, très heureuse à l’idée de revoir Lotte et la famille de Jacqueline Recoing. Charlotte Tenenbaum, Jacqueline et son mari Jean ont assisté à la fête d’anniversaire des 90 ans de Germaine. Jacqueline a lu en présence de Germaine, de Lotte, et la famille Collardey, une lettre émouvante qui commence par ses mots : « Tous les héros ne sont pas des soldats ». Les deux familles sont toujours en contact. Récemment, j’ai assisté à la lecture d’une pièce de théâtre écrite par Jacqueline qui fait revivre cette histoire par la fiction. J’ai la chance de bénéficier d’un travail remarquable impulsé par mon père, qui a consigné, croisé avec l’Histoire les souvenirs de Mamie, et qui a plus tard recueilli le témoignage de la vie de cette femme incroyable qu’était Lotte Tenembaum. Ce récit se nomme « ANJOU 60 15 ». Je suis très fier des actes accomplis par mon arrière grand-mère et de l’humilité dont elle a toujours fait preuve. C’est un honneur de pouvoir participer au voyage « Mémoires de Justes » pour la représenter. Ceci sera mon premier voyage en Israël, un pays qui m’intrigue pour diverses raisons et que je suis heureux de pouvoir comprendre et connaître davantage. »  

Marie-Astrid DE CHABANNES

L’arrière grand-père de Marie-Astrid, Pierre Marie de Chabot est né en 1887 à Mouchamps (Vendée). Mobilisé au 11e corps d'armée en 1915, il fit, selon sa propre expression "la guerre sans dommages", et rentra en Vendée aussitôt démobilisé. En janvier 1920, il épouse Mlle Zoé de Nicolay. Il occupa par la suite de nombreux postes politiques dont conseiller général du canton des Herbiers, conseiller municipal de Mouchamps et député de la Vendée.

Salomon, dit Solo, Lebovici était le médecin dermatologue de Madame de Chabot. D'origine Roumaine, Solo est né à Berlin et vivait à Paris avec son épouse Caroline et leurs trois enfants, Serge, Micheline, et Béatrice. Solo avait été décoré de la Légion d'Honneur et de la Croix de Guerre après la guerre de 1914-1918. Le 26 août 1942, il  fut arrêté par la police allemande à son domicile. Il parvint à sauver son épouse en la faisant passer pour une maîtresse d’occasion non juive. Il fut interné à Montargis puis sera déporté sans retour vers Auschwitz. Dès l’arrestation de son père, Serge prévint ses sœurs et leur conseilla de se rendre au Château du Parc Soubise, propriété du Comte et de la Comtesse de Chabot à Mouchamps.

Les filles furent accueillies par le couple Chabot et leurs 3 enfants. Ils firent passer Béatrice et Caroline pour des amies de la famille. Elles  restèrent à Mouchamps jusqu’au 20 septembre avant de rejoindre leur mère à Loué dans la Sarthe. Les de Chabot continuèrent de les aider en leur envoyant argent et colis.

Pierre et Zoé  de Chabot ont reçu le titre de Justes à titre posthume en 2009.

Son témoignage :


 « J’ai entendu parler de l’histoire de mes arrières grands-parents par l’intermédiaire de ma mère qui s’est rendue à Jérusalem et a parallèlement retrouvé tous les archives (de la correspondance entre sa grand-mère, sa mère, Béatrice et Caroline. C’était très émouvant pour elle.
Pour ma part je n’ai encore jamais été en Israël et je souhaite découvrir ce pays au-delà de l’image parfois très négative véhiculée par les médias. Je crois qu'il ne faut pas réduire Jérusalem, qui veut dire "ville de paix",à une zone de conflits incessants. »

Sara et Quentin DEBEST

Né le 3 avril 1903 à Villefagnan (Charente), Alphée Bonnaud, l’arrière grand-père de Sara et Quentin, entra dans la gendarmerie en 1926.

A la déclaration de la guerre, en septembre
 1939, la communauté juive de Bouzonville (Moselle), située à la frontière allemande, fut évacuée vers Chauvigny(Vienne).  A l’époque Alphée Bonnaud commande la brigade de gendarmerie de la ville. Dés 1940, il prend une part active dans la résistance en fournissant des informations à propos des troupes allemandes aux service de renseignements, aidant des communistes résistants (ce qui lui coûtera quasiment sa place, menacé par un commissaire de police et un sous-préfet qui réclament sa révocation) et en régularisant la situation d’une centaine de prisonniers évadés (sur la demande du commandant de la section de gendarmerie de Blois). En juillet 1942, Alphee parvint à faire éviter l’arrestation et l’internement de dirigeants du réseau de résistance de Saint Aignan sur Cher.

Les soixante quinze réfugiés Juifs de Bouzonville s’inscrivirent  à la mairie de Chauvigny et la mention "juif" fut apposée sur leur carte d’identité. Ils furent accueillis chaleureusement, trouvèrent du travail et un local mis à leur disposition pour servir de synagogue. Ils ne furent pas inquiétées jusqu’en mai 1944.

Lorsque les troupes allemandes arrivèrent à Chauvigny, les autorités municipales et la gendarmerie reçurent l’ordre de rassembler tous les Juifs, en vue de leur déportation.
Le maire,
 Jacques Toulat détruisit les registres de la mairie, et ensemble avecAlphée Bonnaud ils conjuguèrent leurs efforts pour sauver les juifs de Chauvigny. La veille du rassemblement, Alphée Bonnaud, assisté de Camille Thibault, le maréchal des logis, chef de brigade à Pleumartin, tous deux en civil, allèrent de porte en porte, donner l’alerte. Ils firent le trajet en vélo de de Montmorillon à Chauvigny. Les Juifs quittèrent alors la ville, échappant ainsi à l’arrestation et à une mort probable. Parmi les familles sauvées, celle d’Armand Salomon, avec qui Alphée continua d’entretenir une correspondance régulière pendant de nombreuses années après la guerre.

Durant les mois de juin, juillet et août 1944, Alphée Bonnaud, adjudant-chef en poste à Montmorillon puis à l’Isle-Jourdain se met au service des FFI du département de la Vienne transmettant notamment des renseignements sur les mouvements de l’occupant.

Aphée Bonnaud a reçu le titre de Juste des Nations à titre posthume en 2004.

Leur témoignage:
« L’histoire de notre arrière grand-père est très importante pour notre famille. Notre grande tante et notre oncle ont notamment fait beaucoup de recherches à ce sujet. Pour nous, ce voyage est à la fois un hommage à notre arrière grand-père, mais aussi une manière de nous impliquer directement dans ce qui fut une des pages décisives de notre histoire. Nous n'avons jamais été en Israël mais ce pays a une signification particulière pour nous. Nos parents s’y sont rendus pour leur voyage de noces. Ce voyage sera d’autant plus émouvant que nous sommes très attachés à la connaissance du peuple d’Israël et de la religion juive. »

Grégoire LEPIGEON - BONNAFOUS

Les arrières grands-parents de Grégoire, Henri et Adrienne Bonnafous, s’installent en France dans les années 1930, après avoir vécu pendant de longues années à l’étranger (en Chine mais aussi aux Philippines et au Canada). Leur maison, située à Bedarieux (Languedoc Roussillon), accueillera de nombreux juifs cachés pendant la guerre, dont Rachel Weiler, la fille d’un couple de juifs allemands en fuite. Le fils des Bonnafous, Bernard Henri était également engagé dans la résistance : vivant dans la clandestinité, il ne voyait que très peu ses parents.

 

Henri et Adrienne Bonnafous ont reçu le titre de Justes à titre posthume en 2001

 

Son témoignage 

« Pour mon grand-père et ses parents, la résistance était une évidence et j’ai appris dans les détails l'histoire de mes arrières-grands parents assez tardivement à l'inverse de celle de mon grand-père qui a écrit un livre retraçant ses actions.

  Nous n’avons plus de contacts avec les familles sauvées mais je sais que l’une d'elle a pu quitter la France via l'Espagne et plusieurs vivent en Israël. Ce voyage me permet de renouer avec cette partie de l’histoire de ma famille. Je suis heureux de pouvoir célébrer la mémoire de ceux pour qui risquer leurs vies pour défendre des idéaux était une évidence. »

Michèle FORGUES

Les grands-parents de Michèle Forgues, Michel et Francisca Tendero, étaient d’origine espagnole et s’installèrent à Paris avant la deuxième guerre mondiale. Ils eurent 4 filles Marie-Louise, Michèle, Antoinette et Lydie Christiane, la mère de Michèle.

La meilleure amie de cette dernière, Irène Obarjanski, était d’origine juive. Elle fut hébergée par les Tendero pendant près de quatre ans, pendant l’occupation.  Les Tendero recueillirent aussi trois autres jeunes filles de la famille Obarjanski ( Mme Obarjanski, la mère d'Irène Fanny, la soeur d'Irène et la fille de Fanny Simone née en 1942 ). Michel Tendero, qui était cuisinier, parvint à trouver de la nourriture pour nourrir tout le foyer pendant des années.


Michèle Tendero est décédé en 1969 et Francisca en 1991. Ils ont tous deux reçu le titre de Juste à titre posthume, le 26 février 2010.

Son témoignage :

  « Je suis très fière de mes grands parents et de leur histoire. Nous sommes encore en contact avec la famille sauvée. En 2006, un an avant le décès de ma mère, Simone Faïf, la nièce d’Irène Obarjanski en 2006 m’a contactée pour honorer la mémoire de notre famille.
Je suis très honorée de participer au voyage « Mémoires de Justes » pour rendre hommage à l’histoire de ma famille et connaître Israël, une terre marquée par une grande religiosité et meurtrie par les conflits. »

Laurent GILARDINO

Les arrière grands-parents de Laurent résidaient en Haute Savoie, à Monnetier-Mornex. Un jour ils rencontrèrent par hasard une famille de Juifs polonais, les Rudynsk. Ces derniers avaient fuit la Suisse à la suite d’une rafle et passé la frontière clandestinement. Arrivés à un village près de la frontière, ils furent accueillis par le curé. Ce dernier se sachant surveillé, il les orienta vers un chemin parallèle à la route principale. Alors qu’ils étaeint perdus sur la route, ils rencontrèrent Madame Agnès Rutschi épouse Gilardino, qui tenait un enfant, le père de Laurent, dans ses bras. Agnès invita les Rudynsk chez elle. Le père d’Agnès, August Rutschi, et son épouse Cécile protégèrent ce couple pendant deux ans. Le mari d’Agnès, Laurent Gilardino sauva aussi les deux enfants du couple, menacés par des rafles. Il alla les chercher dans le centre de colonies de vacances où ils résidaient et la ramena dans la propriété familiale. Les deux enfants furent scolarisés sous le faux nom de Rudin. Ils ne savaient pas que leurs parents vivaient cachés dans la maison, afin d’éviter que leur présence ne s’ébruite.
Le titre de Justes à été décerné aux Rutschi (à titre posthume) et aux Gilardino, en octobre 1977. Les Gilardino se sont rendus à Yad Vashem pour planter l’arbre qui porte leur nom.

 

 

Son témoignage :

  « Avant leur mort ils avaient toujours été en contact avec la famille sauvée, qui vit désormais en Belgique. Mes grands-parents étaient restés en contact avec la famille sauvée, qui vit désormais en Belgique. Ce sont eux qui m’ont raconté cette histoire. Quand je grandissais, plus de détails me sont parvenus. Je suis de surcroit passionné par cette période sombre de l’histoire ce qui m’a conduit à faire beaucoup de recherches.
Je suis très heureux de me rendre en Israël pour la première fois. Ce pays m’intéresse notamment sur le plan politique, l’occupation des terres, la période révolue des kibboutz etc.… »

Pierre HARENT

Les grands-parents de Pierre, René et Charlotte Harent, ont caché une dizaine de juifs pendant 2 nuits les 16 et 17 juillet 1942 (Rafle du Vel d’Hiv). Ils ont notamment accueilli deux voisins, des juifs polonais, Rivka Patalowski, et son fils Norbert. Le mari de Rivka, Mayer Patalowski a été déporté à Auschwitz où il périt le 2 juillet 1942.

Après les avoir caché quelques semaines à Paris (Norbert vivait dans l’appartement tandis que sa mère restait recluse dans le garage), René Harent et son fils, Emmanuel accompagnent les Patalowski en lieu sûr dans leur famille en province. Rivka et Norbert font le trajet cachés derrière des meubles, dans une camionnette Peugeot 202 conduite par Emmanuel et maquillée en voiture de la Croix-Rouge. René Harent* et Emmanuel sont revêtus d'une blouse blanche d'infirmier.
A l’issue de ce voyage, Norbert trouve refuge dans une famille résidant dans l’Oise. Quant à Rivka, elle vécut dans la Somme jusqu’à la fin de la guerre.

René Harent a reçu le titre je Juste à titre posthume en 2001.

 

  Son témoignage:

« C’est mon père et Norbert qui m’ont raconté l'histoire de mon grand-père pendant la guerre. Je suis très fier de ses actes. C’était un homme de courage et d’honneur. Cette histoire est importante à mes yeux. Je connais très bien Norbert avec qui je suis encore en contact et qui vit à Paris. A mes yeux, c'est un membre de notre famaille. 

Je me rendrai en Israël pour la première fois grâce à ce voyage. L’image que j’ai de ce pays varie en fonction des gouvernements. Je suis heureux de pouvoir connaître ce lieu chargé d’histoire, témoignage du choc des cultures qui l’habitent. »

 

Romain IOUALALEN

 

L’arrière grande-tante de Romain, Madame Jeanne Guy, vivait dans le petit village de Finhan, dans le Tarn et Garonne. En 1943, au moment de l’arrivée de l’armée allemande dans le Sud-ouest ils accueillent leur nièce, Madame Jacqueline Baladié, dont les parents vivent à Toulouse. Au lycée de Toulouse, Jacqueline s’est lié d’amitié avec Françoise Franck dont  les parents juifs ont fui Paris avec leurs deux enfants. Des rafles commencent à être opérées à Toulouse. Monsieur et Madame Franck, affolés, cherchent à mettre leurs enfants à l’abri. Par l’intermédiaire de la mère de Jacqueline (mettre ici ile nom exact) ils prennent contact avec Jeanne Guy et ses parents qui acceptent d’héberger Françoise et son frère Roger. Les enfants sont bien accueillis à Finhan. L’institutrice du village, qui est au courant de la situation, accepte de scolariser les deux enfants. Malgré l’excellence de leurs résultats scolaires, ils n’obtiennent jamais les premières places afin de ne pas éveiller la jalousie. Quelques mois plus tard, l’armée allemande réquisitionne des chambres chez les habitants de Finhan pour loger ses soldats. Les Guy se voient contraints d’héberger un officier du nom d’Otto. Ce dernier n’est pas dupe et devine très rapidement que Françoise et Roger sont juifs. Pourtant il gardera le silence et ne les dénoncera jamais. Françoise, Roger et Jacqueline partagent une chambre à côté de celle de l’officier. Peu avant la libération, Otto quitte le domicile des Guy sans un mot. Françoise et Roger ont pu retrouver leurs parents après la guerre. Par la suite Roger deviendra polytechnicien et Françoise sera un professeur à Sèvres. Cette dernière est morte en 1987. Roger et Jacqueline sont encore en vie et ont gardé contact. En 200 Françoise écrit ces mots émouvants dans une lettre adressée au Centre de Documentation Juive Contemporaine «  Je crois que des actions modestes, accomplies naturellement avec simplicité, peuvent servir d’exemple pour nos enfants. Elles montrent que chacun a un rôle à jouer pour lutter contre le racisme. Elles montrent que les différences peuvent s’estomper en laissant parler son cœur. Je suis heureuse que mon petit village de Finhan, dont les habitants n’ont jamais rien révélé, soient honoré à travers la reconnaissance de la famille Guy. L’aide apportée à ses enfants montrera que le Tarn et Garonne n’est pas seulement la patrie de Bousquet mais aussi celles de gens tolérants et intègres. »

 

Madame Jeanne Guy a reçu le titre de Justes parmi les Nations en 2001.

 

 Son témoignage:

« J'ai entendu parler de l'histoire de Jeanne Guy par ma grand-mère Jacqueline, qui a directement vécu ces évènements et qui reste, en quelque sorte, la gardienne de la mémoire familiale.
C’est la première fois que je me rends en Israël. A mes yeux ce voyage représente tout d'abord l'opportunité de rendre hommage au courage et aux valeurs de mes ancêtres et de tous les Justes. Visiter Israël sera aussi l'occasion de mieux connaître ce pays et ce peuple dont l'histoire et la culture ne cessent de me fasciner. J'espère pouvoir dialoguer avec des jeunes israéliens sur les questions de mémoire ainsi que sur les enjeux auxquels leur région doit faire face. »

Adeline LELIEVRE

 

L’arrière grand-mère d’Adeline, Madame Marie Massonnat résidait en Savoie dans le village de Le Montcel. En 1941, à la demande d’une famille juive de Lyon, elle accepte de cacher une petite fille de 8 ans appelée Berthe Badihi-Elzon.

Madame Marie Massonnat a reçu le titre de Juste parmi les Nations à titre posthume en 1997 La médaille a été remise à ses enfants : Marcel Massonnat, Francia Mouchet née Massonnat,  et Valentine Pignier née Massonnat.

 

Son témoignage  :

« C’est grâce à mon grand-père que j’ai connu l’histoire de mon arrière grand-mère et de Berthe. Nous avons gardé de liens très forts avec cette dernière et mon grand-père la considérait comme une sœur. Berthe vit désormais en Israël et est venu nous voir en France à plusieurs reprises. Pour moi ce voyage est une occasion unique d’aller à la rencontre de Berthe dans son pays. C’est la première fois que je me rends en Israël. Aujourd’hui ce pays m’évoque une image de conflits incessants. Je serais heureuse de le découvrir sous un autre jour et d’en apprendre davantage sur la diversité culturelle et religieuse de ses habitants. »

 

 

Jérôme LELONG

Les arrières grands parents de Jérôme Lelong, Georges et Lucienne Dereims, vivaient dans les Ardennes. Ils se sont liés d’amitié avec les Einhorn, des juifs réfugiés dans la région,  à Remaucourt. La nièce des Einhorn, Suzanne vit à Paris. Sa mère est morte d’une méningite et son père et son frère ont été pris dans des rafles. Se retrouvant seule, à l’âge de 18 ans, Suzanne contacte son oncle et sa tante, les Einhorn. Georges et Lucienne Dereims accueillent la jeune fille jusqu’en janvier 1944. De grandes rafles ont alors lieu dans les Ardennes et Madame Dereims, par précaution, préfère envoyée la jeune fille chez ses parents, les Achart, qui habitent Lalobbe. Quelques années plus tard, Suzanne épouse  le fils des Achart, Lucien. Les familles Dereims et Achart ont caché d’autres familles juives pendant la guerre parmi lesquelles la famille RONA et PAL et bien sur les EINHORN.

 

Son témoignage:

« Ce sont mes arrières grands parents, ma grand-mère ainsi que mon père qui m’ont raconté cette histoire. Je n’ai pas pris pleinement conscience de ce qui s’était passé jusqu’à la remise de la médaille de Justes. Cette médaille est une très belle récompense pour  mes aïeux. Ils ont pris des risques énormes, c’est une formidable histoire humaine. J’ai hâte de découvrir Israël. C'est une grande fierté pour moi. A mes yeux c’est un pays saint, malgré la guerre et les conflits. Je  pense que ce voyage va être chargé d’émotion, et que l’on va redécouvrir toute l’histoire, à travers celle des Justes. Ma grand-mère et mon père souhaitent que je leur ramène le plus de photos et d’écrits possible. Ils espèrent pouvoir se rendre en Israël à leurs tour dans quelques temps.»

Caroline MOREL

L’arrière, arrière grand-mère de Caroline, Madame Elisabeth Roubinet,
résidait en Dordogne, à Saint Raphaël.

En 1943, sur la demande de son beau-fils, Monsieur Dienne, qui faisait
partie d’un réseau de résistance dans les Alpes du Sud, Elisabeth héberge
deux jeunes filles juives de 12 et 16 ans, Evelyne et Hugette Gattégno ainsi qu’un couple de juifs parisiens.

Les deux fillettes restent un an chez Madame Roubinet pendant que leur
parents sont cachés loin de là, à Neuilly sur Seine, chez Madame Dienne, la
fille de d’Elisabeth et arrière grand-mère de Caroline.


L’année passée chez Madame Roubinet fut difficile et périlleuse. Evelyne,
l’une des deux jeunes filles tomba gravement malade. Par ailleurs les
Allemands passèrent plusieurs fois dans le village à la recherche de Juifs.
Les habitants de Saint Raphaël, qui savaient tous que les habitants de la
maison de madame Robinet étaient juifs, se montraient solidaires et ne
dirent jamais un mot (lors d’une rafle dans le village la secrétaire de la
mairie assura aux allemands que les deux jeunes filles hébergées par Madame
Roubinet étaient espagnoles).

Madame Robinet a reçu le titre de Justes parmi les Nations en 2005.

Son témoignage :

  « C’est une grande fierté et un grand honneur de représenter ma famille et
de participer au voyage « Mémoires de Justes » organisé par la Fondation
France-Israël. Pour moi, la terre d’Israël est associée à une image de
diversité religieuse et culturelle. Ce voyage me permettra de mieux
connaître ce pays »

Vincent NOEL

L’aïeul de Vincent Noel, Paul Haering, était pasteur évangélique au sein de la communauté protestante de Carmaux (Tarn) pendant l’occupation allemande. Sa femme Suzanne et lui faisaient partie du réseau d’Albert Delord. Dès 1941, le couple recueille une première famille juive demandant asile. D’autres familles suivent rapidement. Aussi s’organisent-ils pour les cacher principalement à la campagne et dans des foyers sûrs, accueillants et discrets. Ils prévoient également rapidement des vacances pour les enfants dont ils s’occupent afin de les isoler lorsqu’en 1942 une garnison allemande s’installe en ville. Plusieurs de ces colonies durent environ deux mois, avec quelque deux cent campeurs.

Plus tard, le centre de vacances déménage au château de Lautrec, près de Castre. Ce fut en réalité un centre clandestin d’immigration pour les juifs sionistes. De la, ils partent pour la terre d’Israël en passant par l’Espagne grâce à une filière bien organisée.

En 1943, le pasteur commence à fabriquer des faux papiers d’identité pour les donner aux Juifs.

En 1944, le couple enlève un jeune juif hospitalisé à Albi et le confie à une famille qui le cache.

« Père Loup », comme il fut surnommé par les Éclaireurs unionistes de France, traita ses amis juifs comme s’il s’agissait de ses propres enfants. Il leur facilita l’observance du shabbat, leur disant : « Pour moi, vous êtes le peuple du Livre ». Quelques décennies plus tard, Paul Haering expliquait: “Ni Suzanne ni moi ne nous sommes pris pour des héros, mais nous avons tout simplement fait notre devoir avec « crainte et tremblement » parfois, mais après bien des années, nous sommes heureux d’avoir su choisir la bonne attitude. Si cette attitude est reconnue publiquement aujourd’hui c’est tant mieux, car elle peut alors servir d’exemple”

 Yad Vashem a décerné le titre de Juste des Nations à Paul Haering en 1990, et à Suzanne Haering en 1997 (à titre posthume, car Suzanne est décédée en 1995). Paul Haering est décédé en 2005.

 

Son témoignage:

« Mes grands parents parlaient très rarement de la période de guerre. Je n´ai appris que plus tard leurs actions, ils ne s´en vantaient pas, pour eux, c'était tout à fait naturel, mais ils disaient aussi qu'ils ne se rendaient pas compte du danger sur le moment C´est plutôt par l´intermédiaire des membres de la famille je crois, que j'ai la première fois appris ce que mes grands parents avaient fait. Étant assez proche de mon grand père par la suite, nous avons discuté de ce sujet. Je pense que le focus de mes grands parents était d'aider les autres, et c est ce qu’ils ont fait toute leur vie d'ailleurs, avec toutes sortes de gens, et de toute confession. C'est là leur force. Mes grands parents m ont inculqué la tolérance, l´écoute de l´autre.
Je suis très fier de leurs actions. 
Mon frère est de temps en temps en contact avec Judith Konowalof. Cette jeune fille juive avait marqué mes grands-parents qui la recueillirent quelques mois chez eux en 1942. Après avoir du s'en séparer, les années ont passé sans qu'ils n'aient pu se retrouver. Judith s’est manifestée des années plus tards, quelques jours après la disparition de mon Grand-père à qui elle a eu la gentillesse de rendre un dernier hommage en venant à la célébration de son enterrement. Je ne suis jamais allé en Israël. J'ai l'image d'un pays meurtri, mais toujours debout malgré les guerres et les menaces dont il est quotidiennement l'objet de la part de ses voisins depuis des décennies. Mon frère dit que la main de Dieu agit favorablement
envers son peuple, et que cette terre leur appartient. Ce n'est pas une question que j'ai approfondie, ce voyage me parlera peut-être sur ce thème là aussi.
Ce sera surtout un moyen de rendre honneur à mes grands parents, de les représenter,  mais aussi de célébrer et de partager leur mémoire avec le peuple d´Israël. »

Raphaëlle PETIT

En 1942, un passeur anglais en route pour le Portugal fut abattu au dessus du petit village  Saint Hilaire du Harcouët (Normandie). L’aviateur emmenait deux adolescents juifs hollandais  (Lévi et Branca) au Portugal où ils devaient rejoindre des membres de leur famille. Les résistants locaux confièrent les deux enfants à l’arrière grand père de Raphaële Petit, Monsieur Armand Piel. Ce dernier ne faisait partie d’aucun réseau de Résistance mais en tant qu’officier de l’armée française à la retraite et catholique, le chef du réseau cru pouvoir compter sur Monsieur Piel, son sens du devoir et son aversion naturelle pour l’Allemagne (ses frères ainsi que ses beaux-frères avaient été tués dans les tranchés de la guerre 14-18). Les habitants du village connaissaient l’existence de ces enfants hébergés mais personne n’en parlait. Un jour, alors que Lévi allait se faire couper les cheveux, il s’entendit dire par le coiffeur: « pauvre petit enfant juif qui se cache », notamment à cause de son fort accent. A la suite de cet incident, pour la sécurité de l’enfant, M. et Mme  Piel placèrent le garçon dans une famille de confiance (qui a également reçu le titre de « Juste ») vivant à la campagne. Monsieur et Madame Piel gardèrent la fillette (Branca-rebaptisée Bertille) et veillèrent scrupuleusement à ce que le frère et la sœur se voient très régulièrement. Les enfants furent ainsi hébergés chacun de leur  côté jusqu’au Noël 1945, afin de s’assurer qu’ils ne couraient plus aucun danger. Seule la mère des enfants a survécu à la guerre, et a pu retrouver ses enfants.

Monsieur et Madame Piel ont reçu le titre de Justes à titre posthume en 2009.

Son témoignage :

  « J’ai toujours connu Bertille, la petite fille sauvée par mon arrière grand-mère, qui était pour moi comme une grand-tante. Grâce au témoignage de ma mère et de mon grand-père, j’ai appris progressivement son histoire. Bertille est restée jusqu’à la fin de la guerre chez mes arrières-grands parents, traitée et aimée comme leur propre fille. Mon grand-père et ses 3 frères la considéraient comme une sœur. Elle m’a dernièrement raconté que, chaque année, les premières fraises du jardin lui étaient réservées. Pendant la guerre, elle ne pouvait pas aller à l’école, mais ils lui ont fait prendre des leçons de français et de piano.

Je suis très fière de mes arrières grands parents, de leur courage et de la façon humble avec laquelle ils ont sauvé deux vies en risquant la leur et celle de leur famille. Nous sommes toujours en contact avec Bertille, qui vit aujourd’hui aux Pays Bas. Elle a exigé que tous les membres de sa famille apprennent à parler français et nous avons accueilli une de ses petites filles en séjour linguistique il y a quelques années.

 A ma demande, Bertille a relancé  il y a 3 ans les démarches pour que mes arrières-grands parents soient officiellement reconnus comme Justes; elle a aussi voulu que mon grand père (qui était le dernier vivant de ses frères français à l’époque) y soit associé; il a toujours refusé de remplir les dossiers car il ne comprenait pas en quoi il aurait fallu le féliciter d’avoir fait ce qui lui semblait être une simple évidence.
Je ne suis jamais allée en Israël, mais ce pays a une grande importance pour moi en tant que catholique pratiquante. Israël est le berceau de l’Etat juif et celui de la Terre sainte. C’est un pays qui m’attire beaucoup, tant du point de vue historique que culturel, personnel et religieux. En participant à ce voyage, je rendrai hommage à mon grand-père qui est décédé depuis peu. Je suis aussi très heureuse de rencontrer d’autres descendants de Justes, d’aller à Jérusalem et de visiter Yad Vashem. L’histoire de la seconde guerre mondiale a été très marquante pour moi et je pense que ce voyage m’aidera à mieux prendre conscience de cette période noire. Ce voyage permettra aussi de mettre en avant la bonté et l’amour de ceux qui ont su résister aux allemands.»

Emilie SEPTIER

Les arrières grands parents d’Emilie Septier, Madame et Monsieur Louise et Edouard Cartier ( 53 et 59 ans), habitaient dans une grande maison surplombant Château du Loir, dans la Sarthe(72). Entre 1942 et 1945, ils ont caché quatorze juifs répertoriés à ce jour. 

 Louise et Edouard Cartier ont été nommés Justes le 12 février 1990 à la demande des familles Price et Bruger.

 

Son témoignage:

« J’ai appris une partie de cette histoire il y a seulement trois ans. J’ai vu par hasard un vendredi soir un reportage à propos d'Henri Joinovici qui organisait un hommage pour mes arrières grands-parents qui l'avaient recueilli au matin du 12 octobre 1942 suite à la rafle de tous les siens. J’ai tout de suite appelé ma famille et deux jours plus tard, nous étions réunis pour une commémoration à Château du Loir.  Voici l'histoire d'Henri :La police Allemande au matin vint les surprendre. Sa mère lui dit alors de s'enfuir par la fenêtre et de trouver refuge chez les Cartier. Agé de 6 ans il parcourut de mémoire le trajet pour arriver à la maison au petit matin. Mes arrières grands-parents étaient très humbles et ont peu parlé de leurs actes pendant la guerre. Les informations qui me restent me viennent de ma mère et de mes tantes sachant que les 5 enfants de mes arrières grands-parents sont tous décédés à ce jour. Je suis catholique et j’ai toujours eu envie de connaître Israël. J'espère que le travail de mémoire auquel nous allons participer évitera qu’une telle tragédie ne se reproduise dans l’avenir. Je suis également très heureuse de pouvoir rencontrer d’autres descendants de Justes et d’échanger avec eux. »

Sébastien VANNET

Les arrières grands-parents de Sebastien, Gaston et Gabrielle Chignaguet louaient une ferme à Montagnac sur Lède, dans le Lot et Garonne, dans laquelle ils tenaient un modeste commerce de débit de tabac. Sur la demande du bailleur, Mme Estève, ils cachèrent un couple de juifs, Monsieur et Madame Alvarez-Péreyre, de l’hiver 1943 à juin 1944 dans un petit appartement situé au dessus du commerce dont ils ne peuvent sortir que la nuit afin de ne pas éveiller de soupçons. Néanmoins, les Alvarez risquaient continuellement d’être découverts, le magasin, ne désemplissant pas. Leur fils Jacques leur rendait de temps en temps visite en se faisant passer pour des cousins. Didier Chignaguet, le fils de Gaston et Garbielle et Jacques Alvarez-Péreyre le fils de Mr et Mme Alvarez-Pereyre ont quelques années de différences, ce qui permet à Jacques de rendre visite à ses parents en se faisant passer pour un cousin de Didier.
En juin 1944, un client découvre par hasard « les locataires » et demande qui ils sont. Pour ne pas faire courir de risque à leurs hôtes et à eux-mêmes, les réfugiés retournent à Agen.

Le titre de Juste a été remis à Monsieur et Madame Chignaguet à titre posthume en 1991

Son témoignage :

  « C’est mon grand-père Didier et ma mère qui m’ont parlé de l’histoire de mes arrières grands parents. C’est une fierté pour moi d’avoir ces racines. Mes arrières grands-parents ont assumé leur choix et n’ont pas jugé leur prochain, considérant cette action comme normale, et c’est un modèle pour moi d’état d’esprit, ne pas juger son prochain, et encore moins sur des à priori.
Ma mère a gardé contact avec la famille sauvée (Jacques) et j’ai pris contact avec les arrières petits-enfants qui sont à Jérusalem pour préparer le voyage que nous allons entreprendre. Pour moi, Israël est avant tout le berceau des religions. Malgré la couverture médiatique omniprésente je n’ai aucun à priori sur ce pays. J’ai hâte d’aller voir le musée de Yad Vashem, dont j’en ai beaucoup entendu parler par ma famille
»

 

Nicolas VILLENA

Le cousin germain de la grand mère de Nicolas, Monsieur  Jean-Marie Lapeyre, résidait à Saint-Sever dans le département des Landes, avec ses deux filles Nathalie et Germaine. Bien que leur maison soit située près de la Kommandatur, ils cachèrent plusieurs enfants juifs pendant la guerre. Les enfants allaient à l’école et à la messe si bien qu’ils passèrent presque inaperçus. En 1943, la famille Hafon, des juifs originaires de Turquie et résidant à Paris décident de mettre les enfants en sécurité et les envoie chez les Lapeyre chez lesquels ils resteront jusqu’à la fin de la guerre.

 A la demande des Hafon, Le titre de Juste a été remis à titre posthume à Monsieur Jean-Marie Lapeyre et ses filles en 2009.

Son témoignage :

   « Ce n’est que l’année dernière que ma famille et moi avons appris l’existence de cette histoire, lorsque Yad Vashem nous ont contactés concernant la remise le titre de Justes parmi les nations à mes aïeux. C’est un honneur d’apprendre que des personnes de ma famille ont fait une telle chose. Depuis la découverte de cette histoire nous avons une relation amicale avec Roland et Odette Hafon, les enfants de la famille sauvée. .Je les ai déjà rencontrés une fois.  Roland Hafon ainsi que son épouse et sa soeur Odette Hafon doivent venir fin avril pour se joindre avec notre famille, afin de déposer le diplôme des justes au musée de la résistance de Grenade sur Adour. Je ne suis jamais allé en Israël. Ce voyage me permettra de découvrir un peu ce pays et voir de mes propres yeux cette terre dont on parle si souvent. »